Bibliothèque de BARANTE : vente aux enchères 2021

Du 23 au 25 mars 2021, 1350 lots de la bibliothèque du château de Barante – riche au XIXème siècle de quelque 60 000 ouvrages, ce qui en fit le fonds le plus important de France en mains privées- ont été mis aux enchères à Clermont-Ferrand.

Nous reproduisons ici le texte d’introduction des catalogues diffusés, pour la vente aux enchères, par les commissaires-priseurs associés et habilités, Anaf - Jalenques - Martinon - Vassu, avec leur aimable autorisation.

Deux ventes en enchères ont eu lieu précédemment, en novembre 2016 et mars 2017.

BIBLIOTHÉQUE DE M DE BARANTE

La bibliothèque de Barante a été constituée pendant plus de trois siècles par les générations successives d’une même famille, les Brugière, originaires de Thiers. Le premier fonds date du XV° siècle. Aux XVII et XVIII° siècles, les Brugière de Barante, qui prennent désormais le nom de leur fief, siègent au présidial de Riom jusqu’à la disparition de cette institution en 1790.
Claude-Ignace Brugière I, dont la signature manuscrite figure dans la marge inférieure de quelques volumes présents dans cette vente, fut un disciple de Port-Royal. Il était cousin de Blaise Pascal. Au XVIII° siècle, la bibliothèque sera enrichie par un autre Claude-Ignace de Barante, d’un grand nombre de livres d’histoire naturelle, de voyages, d’ethnographie...
Incarcéré à Thiers en 1793 pour être envoyé à Paris devant le tribunal Révolutionnaire, il écrit à sa femme du fond de sa prison pour lui indiquer les titres des livres à acheter et lui donner des consignes pour le relieur. Libéré, il retrouvera sa chère bibliothèque.
Sous le Directoire, venu à Paris pour surveiller les études de ses fils, il fréquente les salons littéraires où il rencontre Morellet, Suard, et la plupart des écrivains de l’époque. Préfet de Genève sous l’Empire, il se lie au groupe de Coppet et à Madame de Staël qu’il était chargé de surveiller. Ami de Necker, Saussure, Pictet, Mallet, il achète un fond Naville qu’il transporte en Auvergne. Pendant son séjour à Genève, le préfet Barante faisait relier la plupart de ses livres sobrement, en demi-basane blonde, sans doute par un atelier genevois qui travaillait pour l’imprimeur-éditeur J.J. Paschoud. Son fils, Prospère de Barante, dirigea ensuite la bibliothèque ancestrale.
Dans sa jeunesse, Prosper fut, avec Benjamin Constant, le très aimé fidèle de Madame de Staël. Il a enrichi la bibliothèque familiale de nombreux ouvrages en rapport avec sa longue carrière d’homme de lettres, d’homme politique, d’historien et de diplomate. Les littératures étrangères, la littérature allemande en particulier, peuplent alors les travées sans cesse ajoutées.
Prosper de Barante faisait ordinairement établir ses livres par Lebrun, un ancien ouvrier de Simier, qui exerça de 1830 à 1857 au 126 rue de Grenelle à Saint-Germain, "un de ces relieurs qui aiment leur art avec passion (...) il s’est livré à de nombreux essais pour teindre en diverses couleurs le cuir de Russie et est parvenu à donner sept nuances différentes"*.
Prosper de Barante confiait aussi certains volumes à Simier fils, 152 rue Saint-Honoré, qui succéda à son père en 1837 et mourut en 1847. Il fit aussi travailler Antoine Bauzonnet, ancien élève de Purgold et Simier père. Son atelier se trouvait au 17 rue du Four. Associé avec son gendre Trautz, les reliures sont signées Bauzonnet-Trautz de 1840 à 1851. Ce sont eux qui ont relié les nombreux volumes en demi-veau violet de la bibliothèque de Barante.
Après l’incendie de l’ancien château de Barante en 1842, Prosper fera construire le château tel qu’on peut encore le voir aujourd’hui. Le rez-de-chaussée de la demeure est presque entièrement voué à la Bibliothèque agencée sur deux niveaux dans une enfilade de trois grandes salles.
À l’occasion du Congrès international des Bibliothécaires et des Bibliophiles à Paris en 1923, le baron Claude de Barante fait une communication qui sera publiée chez Jouve en 1925 sous le titre Une bibliothèque privée constituée par une même famille depuis plus de trois cents ans. Il y déclare que la bibliothèque de Barante comprend alors soixante mille volumes.
Outre les diverses marques de provenances antérieures, les ouvrages de cette bibliothèque portent l’un des quatre ex-libris que la famille de Barante a utilisés de la fin du XVIII° au début du XX° siècle.
Une première vente des ouvrages et archives de la bibliothèque de Barante a eu lieu à Clermont en mars 2017.

* Notice de l’exposition de 1849

Si les livres racontent souvent des histoires, une bibliothèque peut parfois raconter l’Histoire, petite ou grande. Les 23, 24 et 25 mars 2021, l’étude Vassy et Jalenques de Clermont-Ferrand disperse le contenu d’une bibliothèque familiale, dont la constitution a commencé au XVIIe siècle. « Nous avons sélectionné environ 1 300 livres parmi les milliers qui se trouvent encore au château de Barante, s’émerveille l’expert Tristan Pimpaneau. L’ensemble a été choisi, relié, classé et conservé dans la même famille depuis trois siècles. Et pour aider les amateurs à s’y retrouver, nous avons divisé la vacation en chapitres thématiques ».