Le doigt sur la détente

Ce sont les trois mois les plus propices pour l’avoir : le doigt sur la détente ! Partir, s’évader, se reposer, changer les habitudes : se détendre. Faire ce que l’on ne fait pas le reste de l’année, tout au moins parfois le faire ailleurs. Ceux qui ne partent pas (il y en a) par impossibilité ou par choix sont parfois entraînés malgré eux dans des changements, amis partis, petits magasins fermés, enfants en centre de vacances alors que les parents travaillent. D’autres mettent à profit ce temps pour travailler chez eux, que ce soit des travaux de rénovation dans la maison ou au jardin.

Pourtant, ce qui domine, c’est bien de partir, d’aller loin, de plus en plus loin ! Ce sont les « congés payés » qui sont à l’origine de ces départs. Ils furent instaurés en France par le « Front Populaire » en 1936 (15 jours) bien qu’ils aient fait une timide apparition sous le Second Empire (mais réservés aux seuls fonctionnaires) et qu’ils existassent déjà dans certains pays du Nord, notamment en Allemagne, dès le début du XIXème siècle.

Cet acquis social contribua largement au développement du tourisme de masse, d’autant plus que ces congés payés s’allongèrent : trois semaines en 1956, quatre en 68, cinq en 1982. C’est certain, c’est mieux qu’en Chine (21 jours) ou aux U.S. A. entre 15 et 25 jours ! Plus ou moins, nous participons tous à cette idée de détente générale : ceux qui sont en retraite ne rechignent pas à partir durant ces mois, malgré la densité de touristes sur les routes, il faut dire que le temps d’été y est pour quelque chose. L’idée dominante, c’est de s’éloigner du cours ordinaire du quotidien parce que pour « s’évader » il faut tenter de l’oublier, mettre de la distance avec les soucis et les tracas, en un mot l’adversité. Cette quête d’explorations diverses occupe l’esprit, en dénichant des possibilités d’évasions et d’explorations diverses. Ce qu’il faut c’est s’inventer un monde nouveau, même si l’on sait qu’il sera éphémère.

Les directions de nos lieux de vacances seront prises en fonction de nos goûts et de nos projets : ceux qui aiment les bains de mer ne prendront pas la route des Alpes, ceux qui louent des gîtes peuvent maintenant trouver là aussi un vrai dépaysement : yourtes, cabanes dans la canopée ou sur pilotis, chalets accrochés à flanc de montagne, maison tournante ou posée sur les marais pour l’observation des animaux etc. Ceux qui vont habiter quelque temps au bord des lacs ou dans des châteaux n’auront que l’embarras du choix, tout autour : concerts, visites, expositions. Et puis, il y a ceux qui possèdent une « maison de campagne », même s’ils sont de moins en moins nombreux, c’est vrai que le temps que l’on passe à leur entretien est un rappel des réalités, donc un frein à l’évasion ! Les maisons de famille ont encore la cote, elles restent un point d’ancrage pour les familles (souvent nombreuses) venues de la capitale ou d’autres villes et toujours propices aux grands rassemblements, mariages, anniversaires et autres « cousinades ». Le camping (en terrain approprié) occupe une large place durant ces vacances d’été. C’est souvent le monde du bronzage (parfois intégral) pourquoi pas ? de la découverte des cuisines régionales, du farniente. Curieusement, on y trouve parfois (que ce soit sous tente ou en caravane) une façon de se « reconstituer ailleurs », d’imiter ce que l’on a quitté à la maison (lorsque l’on revient toujours au même endroit) : palissades, pots de fleurs, télé. mêmes voisins que l’an dernier, comme quoi, s’évertuer à recopier au mieux son train-train habituel peut aussi s’apparenter à une détente !

Mais il y a aussi les grands voyageurs, les globe-trotters avec vélos, (ou motos) sacs à dos (ou sans), les auto-stoppeurs de tout poil, les voyageurs en train, en avion, en bateau et même à cheval (roulottés ou pas !), tous ceux, chercheurs d’un certain bonheur de la « variation ».

Il ne serait pas honnête de ne pas parler de ceux qui, durant ces vacances, n’aiment rien en particulier mais veulent partir parce que tout le monde part (enfin presque), ceux-là ont la détente plus molle ! Mais on leur a dit que ça fait toujours du bien d’avoir le doigt dessus !

Dans tous les cas de figure, bonnes vacances à tous, même si elles touchent à leur fin !

Jean-Paul Gouttefangeas

Crédit photo Vincent Treussier.