Un printemps sous les nuages

Une fleur, quelques fleurs, des champs de fleurs, on ne s’en lasse pas, c’est comme les sourires, de toutes parts la nature se réveille comme une espérance, mieux une résurrection après l’hiver, mais c’est bien connu : une hirondelle.............. À peu de jours seulement de quelques sérieuses gelées voilà que le monde change (enfin le monde de la nature) parce que pour le reste ça n’est pas gagné ! C’est même carrément bien à l’envers, les histoires du Monde (y compris le nôtre) et malgré le vert qui montre le bout de son nez et qui n’arrive pas à cacher la noirceur ambiante.

Pourtant le printemps c’est la répétition d’un temps de grâce dans le cycle immuable des saisons, nous en avons besoin, on ne s’en lasse jamais, c’est toujours une rencontre, des retrouvailles malgré les impressions de déjà vu : "esprit du printemps, manifeste toi auprès des humains avides de renouveau". La moulinette à changement tourne sans cesse, nous dispensant la régénérescence salutaire, c’est comme une bonne grosse histoire d’amour entre la gigantesque machine de l’ordre établi des choses et nos vies qui en dépendent. Après avoir largement puisé dans nos réserves durant tout l’hiver et bien que nous possédions plus de ressources qu’on ne le croit, le printemps est indispensable pour nous "recharger". C’est sûrement ce temps qui développe notre volonté physique et notre équilibre mental, le tout engorgé d’une clarté nouvelle et parfois radieuse. C’est ce même temps qui est peut-être propice pour nous investir au plus profond de nous-mêmes dans toutes les sensations corporelles, dans la pensée, dans la réflexion et dans l’action.

Malheureusement au-dessus de tout ça il y a les nuages sombres et même noirs. Nous voyons ces duretés aisément reconnues inhumaines de par le monde : conflits en tous genres, guerres, luttes sociales graves, misères, la liste est longue, sans parler des départs de ceux que l’on aime. C’est certain le printemps et l’espérance ne suffisent pas pour que nous soyons tous heureux, même s’ils y participent. Il faut une sacrée dose d’espérance dans les yeux et dans le cœur pour certains pour qui ce serait une planche de salut, pour que ça leur fasse du bien.

Vous me direz qu’il existe des palliatifs, la spiritualité, l’ascétisme, la méditation, conserver l’amitié des amis, les rencontrer prendre un verre avec eux. Je suis le premier
de ceux là. Il arrive même parfois au bon vivant optimiste rondouillard que je suis d’être rond (mot exagéré) tout court ! Et alors ? Je sais aussi ‘’qu’avoir le gosier pentu’’ et s’amouracher du ruissellement du vin dans les verres (avec modération) n’empêche pas comme on dit ‘’ces réveils émouvants mais difficiles’’ après avoir tenté d’atteindre nos désirs ! Peut-être que le bonheur ne vient pas obligatoirement de l’observance des règles établies. Cette sorte de pureté morale toute faite justement qui s’exprime par des règles et des interdits n’est sûrement pas suffisante ? On peut peut-être boire dans deux verres à la fois ? Ca ne renversera pas le monde ! A moins que ce soit en cherchant bien au fond de nous que nous tentions de trouver ce qui n’est pas dit et que nous devons découvrir ? C’est cette méconnaissance de nous-mêmes qui réclame des règles, c’est ce vide qui brouille notre vision des choses et souvent notre comportement : le bien, le mal, notre monde est perturbé à ‘’se mouvoir gracieusement de l’un à l’autre’’. Mais au juste, quel est le remède qui pourrait laver nos corps et décaper nos esprits ? Etre imperméable au mouvement de balancier des nouvelles et des événements, des modes de notre temps, s’isoler dans le silence ou la solitude ?

Allez savoir. Ce qui est certain, c’est que l’on ne peut pas contrôler son cœur, c’est lui qui fait tourner la moulinette !

Nous nous débattons dans une existence écrite en plusieurs chapitres entre période faste et tranquillement heureuse et tout le reste (qui l’est moins), nous sommes en droit d’être parfois inquiets.

J’ai appris dernièrement qu’en vieillissant les neurones responsables de toutes nos angoisses se détruisent au fur et à mesure, le problème c’est que tous les autres meurent aussi !

Je crois au final que nous sommes tous en chemin mais bien loin d’être arrivés. Résistons sous les nuages menaçants, profitons du printemps et ‘’vivons nos vies comme si elles étaient réelles’’, ça ne rend peut-être pas l’existence plus facile mais ça la simplifie.

Jean-Paul Gouttefangeas

Merci à François-Noël Masson pour la photo qui illustre cette chronique.