Sombres pensées

Une fois n’est pas coutume, j’ai envie de parler de la marche du Monde ! La tournure de ce que je vois, de ce que j’entends, de ce que je ressens et de ce que je pressens m’inquiète grandement. Il y a, c’est certain, matière à s’interroger. Alors mauvaises pensées, ou sombres, ou tristes ?

Des gouvernants élus (parfois) démocratiquement, d’autres propulsés on ne sait trop comment, d’autres qui s’imposent par la force (souvent armée) sans compter les aigrefins que la fortune installe au pouvoir ! C’est à croire que tous les coups sont permis, la fin justifiant les moyens. Je sais, tout ça n’est pas nouveau mais je crois que la proportion des irrégularités augmente. Allons-nous vers des gouvernements d’injustice et d’oppression, un Monde où l’argent serait le maître (ce concept est déjà bien avancé), un Monde qui n’accepterait pas les différences ?

Il faut bien reconnaître que gouverner un pays ne doit pas être facile, ni de tout repos. Malgré cela, on assiste à des luttes incessantes pour le pouvoir, ce qui n’empêche pas la grande sincérité de certains à vouloir instaurer le mieux.

Je m’empresse de dire qu’il faut des chefs qui gouvernent, loin de moi l’idée de m’associer à l’idée et la phrase trop faciles : ‘’tous pourris’’. Les temps changent et les méthodes aussi et souvent par la force des choses.

C’est là que je suis habité par de sombres pensées.

Est-ce que les temps qui vont suivre seront dominés (pour ce qui concerne les gouvernements) par la mise en place de régimes militaires, totalitaires, voire
dictatoriaux ? Est-ce que la seule façon de diriger des peuples et des pays passera par la force ? La question, dans sa rigueur, est terrifiante ! Ce qui reviendrait à dire que nos vieilles démocraties passeraient à la trappe ? A t-on tout essayé, tout tenté avant d’en arriver là ?

Quel est le premier mal ? Ne serait-ce pas en premier lieu la démographie de la planète ? était-elle prévue pour recevoir huit ou neuf milliards d’individus ?
L’accélération a été prodigieuse quand on sait qu’il y a seulement 220 ans, nous étions un milliard et que la population a doublé au cours des 50 dernières années ! Nous sommes toujours dans une phase ascendante puisqu’ il est prévu qu’il y aura 10 milliards d’individus à la fin de ce siècle. En 12 ans, ce chiffre est passé de 7 à 8 milliards. Un autre constat, il y a, à l’échelle mondiale, deux fois plus de naissances que de décès. La bonne nouvelle (si j’ose dire), c’est qu’à partir de 2100, la population de la terre va baisser, notamment à cause de la baisse de fécondité, qui est déjà en marche dans plus de la moitié des pays (dont le nôtre), la première conséquence étant que cette baisse empêchera de maintenir le niveau de population (dans les pays les plus impactés). Pour le moment, certains chiffres sont vertigineux : un exemple, vers 1960 l’Indonésie comptait 97 millions d’habitants pour passer à 280 millions de nos jours et que dire de l’Inde, 365 millions au milieu du XXème siècle pour arriver à 1milliard 300 millions de nos jours ! Étonnant, quand la science nous apprend que l’Afrique comptait 200 000 individus (il y a un million d’années quand même !). La révolution industrielle a été le grand déclencheur (le plus spectaculaire) du phénomène de l’amélioration du niveau de vie vers le milieu
du XIXème siècle : les progrès de la médecine, la baisse de la mortalité (en particulier infantile) donc, augmentation rapide de la population. La première de ces explosions démographiques s’était produite il y a 12 500 ans, lors de la révolution de l’agriculture (on quitte le monde des chasseurs cueilleurs).Le phénomène du vieillissement des humains (facteur relativement récent) est aussi à prendre en compte et peut engendrer, dans certains pays, de la misère car il faudra (entre autres éléments) prendre soin de toutes ces personnes âgées.

Aristote, déjà, disait : ‘’ il y a danger pour l’ordre public lorsque les hommes deviennent trop nombreux’’, pensée prophétique, c’est certain. Thomas Malthus, économiste britannique (1766-1834) incitait aussi à la baisse de la natalité écrivant : ‘’la population progresse plus vite que les subsistances’’. La surpopulation serait-elle la seule ‘’pollution’’ ? Certainement pas, même si la terre va effectivement vers un état de surpopulation. Notre planète est un ‘’être’’ vivant et c’est peut-être la Mère Nature qui éliminera ‘’l’excédent humain’’ par le biais de la pollution et de la surexploitation des ressources naturelles. Il ne faudra pas en arriver au ‘’jour du dépassement de la terre’’ car cela a déjà été annoncé par certaines théories, il faudrait près de trois planètes Terre si toute l’humanité vivait comme vivent les Français aujourd’hui ! (pour ne parler que de ceux-là). C’est certain, la croissance dans un grand nombre de domaines ne peut être durable. Allons-nous dépasser la ‘’capacité de charge’’ de notre habitat ? Pourrons-nous absorber tous les déchets que nous produisons ?

D’autres facteurs sont à prendre en compte dans les variations démographiques : les migrations de masse, les guerres, les famines et les maladies. La dernière connue de ces grandes maladies a été le Covid 19, qui a fait environs 15 millions de victimes dans le monde en trois ans. Les chiffres des grandes pestes du Moyen Age (et avant) sont terrifiants : en 542, sous le règne de Justinien, la moitié de la population de l’Empire Romain disparaît, en 1340, ce sont 450 millions de morts dûs à la peste noire, puis 60 ans plus tard, encore 350 millions dans le monde. Il fallut deux siècles, en Europe, pour retrouver le niveau de population du milieu du 14ème siècle. c’est la plus grande dépression (la moitié de la population meurt) en Europe médiévale et peut-être est-ce similaire dans le monde entier (tous les continents ont été touchés).

On peut ajouter d’autres fléaux dévastateurs, la grippe de 1918, 50 à 100 millions de morts, la variole, le sida avec ses 48 millions depuis 1981. Pour autant, les dernières pandémies n’ont eu qu’un petit impact sur les populations mondiales.

La survie de l’humanité ne tiendrait-elle pas au respect des modes de vie, de nos comportements qui devraient davantage prendre en compte l’environnement et la biodiversité ? On parle beaucoup du réchauffement climatique (qui pour l’instant ne serait pas une grande cause de mortalité), des industries très polluantes, des cultures de plus en plus intensives, des élevages outranciers, de la destruction des forêts au profit de plus grandes surfaces de cultures, cette crainte n’est pas nouvelle, le grand Ronsard déjà, du temps de la Renaissance, ne disait-il pas s’adressant au bûcheron de la forêt : ‘’écoute, bucheron, arrête un peu le bras’’. Cette pratique a pour premier effet de diminuer la qualité de l’air que nous respirons, de réduire les contrées jusque
là habitées par les animaux. Vous avez constaté, comme moi, que les reportages que l’on voit à la télévision, qui parlent et montrent des animaux sauvages, ont presque toujours cette conclusion : espèce en voie de disparition ! Pour citer Tertullien (deuxième siècle ap. J.C.) : ‘’nous sommes un fardeau pour le Monde, à peine si les éléments nous suffisent, la nature va nous manquer !’’. Un constat s’impose, le genre humain pourrait outrepasser les limites des ressources disponibles, dans un réel qui serait chaos...

Tous, nous ne pouvons qu’assister à un regain de violences dans nos sociétés, même des enfants en sont tous les jours des acteurs. Certaines religions engendrent des crimes, dans d’autres domaines, les images sont destructrices de repères et de discernement et de morale (j’ai osé ce mot !). Nous nous habituons aux images de guerre, leur répétition les banalise.

Cet ensemble de facteurs est en train de modifier les comportements sociaux. La guerre des terres rares est déclarée. Les populations se déplacent (ou sont déplacées), les mouvements migratoires vont s’accentuer, les mesures de protections vont se durcir, les masses seront manipulées pour faire bénéficier à des hommes de pouvoir des moyens de mettre en place des idéologies douteuses voire mortifères (ça s’est déjà produit). Qu’est-ce qui se prépare ?

Ces mauvaises pensées dont je parlais au début de mon texte reviennent sur le tapis, elles me rebutent bien sûr ! Imaginez un instant ce que pourraient être les décisions de quelque chef fasciste : parmi elles, on peut imaginer les pires : vider une partie des prisons, en éliminant tous les prisonniers condamnés à plus de 15 ans de réclusion ! Arrêter la vie des gens à la date limite de 80 ans ! Supprimer les malades incurables ! Pour la police, utiliser les armes contre les malfrats, après la troisième sommation ! Limiter pour tous la quantité de nourriture, obligation de consommer les fruits et légumes cultivés sur le territoire, aucune voiture garée dans les rues (garage obligatoire). On peut ajouter l’interdiction des voyages touristiques en avion, plus de bateaux transportant plus de 500 passagers en même temps. Plus de publicité intempestive, etc. etc.

Comment ai-je pu avoir ces pensées ? En espérant de tout cœur que, malgré le comportement de certains citoyens de tous bords, où l’opposition à tout est
prépondérante et peu constructive, où l’on voit par ailleurs un désintérêt pour la chose publique, où la contestation prend en général le pas sur la participation, en espérant, disais-je, que la violence (dans de trop nombreux pays) ne l’emportera pas sur ce en quoi je crois toujours : la démocratie et tout en tenant compte que l’Homme a des ressources exceptionnelles d’inventivité et de survie. À moins que ce soit la spiritualité (quelle qu’elle soit) qui revienne en force pour le salut du plus grand nombre.

Jean-Paul Gouttefangeas

Crédit photo : Jean-Luc Gironde.