Mots volés

Vous lisiez, eh bien chantez maintenant !

En effet, les mots en rouge devraient vous rappeler une chanson que vous pouvez fredonner au passage !

Le jeune homme était parti de chez lui assez tard dans la matinée. Il avait cette idée en tête depuis la nuit durant laquelle il avait mal dormi (ce qui explique peut-être son réveil tardif). Passer seul un dimanche à la campagne était une envie à laquelle il n’avait pas envie de s’opposer. L’idée de quitter la ville où il était pris par la main dans cet enfer moderne et de pénétrer dans cet automne qui vient d’arriver il croyait fermement que le bonheur existe ailleurs que dans le rêve. La rue l’avait mené vers la mer il passa devant la maison sur le port d’où son père les avait quittés sa mère et lui. Tous deux s’étaient fait une raison, il pouvait revenir il ne trouverait rien qui lui rappelle cette vie de famille. Autour sur le quai comme d’habitude il y avait la mer la foule, la mer au loin - sans arrêt roulait ses galets - ce qui lui rappela une chanson : ’’voyage, voyage’’ pensa-t-il je ne regrette rien, voilà combien de jours, voilà combien de nuits, même s’il revient, un beau jour ou peut-être une nuit, malgré tout, ça lui ferait tellement plaisir de le voir revenir, d’emblée il entamerait je vais te chanter la ballade des gens heureux, son retour effacerait peut être sa tristesse et il pourrait alors lui dire : non je ne regrette rien et dans ce cas précis je ne chante pas pour passer le temps.

Et puis pourquoi être triste se disait-il encore ; il y a le ciel le soleil et la mer en moi je veux allumer le feu de mes désirs et j’aimerais tant voir Syracuse mais je ne suis pas un héros et prendre mes désirs pour des réalités est une autre affaire : oh viens mon beau soleil, oh viens ma nuit d’Espagne qu’il est bon de savoir que parfois c’est la mer qui prend l’homme - pour l’emmener vers demain.

Le jeune homme il venait d’avoir 18 ans finit par quitter le bord de mer pour s’engager dans la lande et sa terre brûlée au vent qui le mènerait après le plateau de plaines en forêts, dés que le vent soufflera et que chantera la rivière insolente à faire crier grâce à tous les échos ce sera alors le premier village. Dans sa partie basse, c’est un endroit qui ressemble à la Louisiane, on dirait le sud à partir de là, tout le paysage se transforme, très vite dans un coin perdu de montagne - au fond de la vallée une cloche sonne, sonne……..

Il marcha longuement par la route escarpée avant d’arriver sur la place de l’église. Tous les gars du village étaient là, c’est normal, les copains d’abord. Au milieu du groupe : une jolie fleur attira de suite son regard et toute son attention. En s’approchant d’elle il lui dit en se faisant tout petit : m’en voudrez-vous beaucoup si je vous chante quelques mots d’une chanson ? Non répondit elle mais nous serons plus à l’aise dans un coin tranquille tout en me demandant d’aller siffler la haut sur la colline, qu’elle m’y rejoindrait avec joie. Viens, viens, viens pour moi pensa t-il pensant : la première fois que je l’ai vue c’était comme un petit coquelicot ! Auparavant à tout hasard j’ai cueilli des fleurs car ça fait toujours plaisir. À partir de ce moment là il se dit ça y est, je vois la vie en rose, bonjour, bonjour les hirondelles.

Que faites vous donc dans la vie demanda-t-elle ? Je suis chanteur et je chante pour mes copains. Mais vous jeune fille comment vous appelez-vous ? Esméralda. Il était ébloui. Tout lui plaisait en elle, ce sont des roses blanches qu’il aurait voulu lui offrir ou plutôt des roses rouges, des gerbes, des montagnes de roses. Oh il savait bien, ce n’était rien qu’un feu de bois, car venue de la capitale elle passait ses vacances ici, demain elle partirait. Comme pour le consoler, en vraie citadine elle lui disait : bien sûr ce n’est pas la Seine mais c’est bien joli tout de même. Lui, quoi qu’elle dise il buvait ses paroles, il ne résistait plus : je vais glisser mes mains dans les cheveux d’Esméralda et tous deux, le vent nous portera. Le temps passa si vite pour eux ils se dirent : c’était une nuit comme on n’en connut pas depuis des décennies, pendant des heures, ils firent ce que font tous les amoureux qui s’bécotent sur les bancs publics sil avait eu un petit violon, en s’accompagnant d’un doigt ou quelques doigts il aurait joué une mélodie d’amour.

Soudain elle prononça la phrase assassine : il est cinq heures, le jour se lève ça me fait de la peine mais il faut que je m’en aille. Il reçut le message en pleine figure. Allez, soupira-t-elle, tu sais bien qu’il n’y a pas d’amour heureux, tu verras, avec le temps tu oublieras, après tout ce ne fut qu’une brève rencontre. Sans pour autant aimer à perdre la raison il avait envie de lui dire : que serais-je sans toi les yeux humides mais qui parle de bonheur a souvent les yeux
tristes
que voulez-vous quand on n’a que l’amour à offrir et qu’on est resté trop longtemps dans le désert qu’est son absence, c’est difficile de ne pas y croire.

Elle était partie. Autour de lui les lueurs de l’aube se coloraient et songeait-il : tu ne viendras pas ce soir, regarde le soleil se lève mais c’est certain : j’attendrai le jour et la nuit, - tombe la neige, tu ne viendras pas ce soir.

Tout autour, il ne pouvait s’empêcher de penser : pourtant que la montagne est belle.

Jean-Paul Gouttefangeas