La cathédrale

Qu’elle soit couverte de plomb, de cuivre ou d’une nuée de sphères orientales ou bien encore de lanternes semblables aux godets de verre d’un lustre de mosquée, c’est-à-dire byzantine, qu’elle se nomme Ste Sophie, St Marc où tout simplement Notre Dame, qu’elle soit précédée d’un parvis de pierre, ou sans, avec des emmarchements comme au Puy et à Clermont ou encore posée sur une pelouse comme à Pise, la cathédrale romane ou gothique est toujours l’église Mère de la cité. Elle fait partie de ce groupe de monuments divins qui flottent entre terre et ciel, symbolisant l’élan mystique des peuples de la grande famille d’Occident vers la divinité et ce, dans presque toute l’ancienne Europe. Nous connaissons bien le berceau de cet art si noble, il réside entre Somme et Oise, là où quelques rivières délimitent un petit territoire au doux nom d’Ile de France ! Cette lignée si féconde engendra les plus belles réalisations gothiques et ce rayonnement dura 400 ans. Oui, la cathédrale gothique c’est la France et la plus belle des France !

Elle tient dans l’histoire de notre pays la même place qu’elle occupe encore aujourd’hui dans son paysage. Elle est la forme de la plus haute pensée et pas seulement pour nous Français mais pour tous les hommes en quête d’Absolu. Parler de la cathédrale, c’est nommer la spiritualité et la France de toute une époque, car ces formes de nefs, de tours, de vitraux et de flèches, ce sont les signes d’une croyance ancrée dans notre histoire.

La cathédrale du temps de St Louis est une des plus belles choses que la France ait produite de main d’homme. Ces bâtisseurs, si chers au regard de notre histoire construisaient en eux un suprême édifice, ils portaient dans leur âme le trésor de nos plus profondes pensées. C’est dans cette construction sublime que nos pères ont déposé leurs plus profonds sentiments et tout le sens de nos destinées, toutes les idées que nous nous faisons de la terre et du Ciel. Ces Maîtres Bâtisseurs nous ont rendu nos titres et c’est à nous encore en ce XXI ème siècle de redécouvrir la plus haute image que nous puissions nous faire de nous-mêmes en perfectionnant cette ressemblance perdue de quelque chose qui nous dépasse. La cathédrale est le grand témoin de nos vies passées, elle a vu défiler à ses pieds toute notre Histoire et sous ses voûtes sûrement écouter l’ardente prière d’un peuple en quête de spiritualité, qui, dans un élan vers l’infini a sans nul doute contribué à en élever la hauteur.

Quand la cathédrale brûle, elle est comme un cygne blessé mais elle n’est pas morte,‘’STABAT MATER’’ ( ‘’la Mère se tenait debout’’) et nous la guérirons, ses grandes ailes que sont les contreforts la maintiennent debout, sa flèche, comme un cou majestueux se redéploiera et sa façade hiératique et somptueuse continuera de parler et d’enseigner aux foules parce que c’est sa mission. La haute épave des toitures de Notre Dame que l’on voit flotter au-dessus des toits de Paris doit nous faire espérer et comprendre comment l’homme peut aussi honorer et ennoblir la terre.

Je vais conclure ces quelques lignes sur la cathédrale, mais je suis heureux de croire qu’il est des lieux nimbés de mystères et de symboles, des lieux sur lesquels pèse une hérédité de joie et de paix, des lieux soumis à une domination mystique : la cathédrale est de ceux-là.

Quelques vers d’un poète oublié : Charles de Pomairols.

‘’Toi tu te cachais dans l’obscure maison
Qui s’abrite des vents au pied de la colline.
J’ignorais tout de toi, Vierge, ô blanche voisine ! Mais notre pays même, avec grâce et douceur,
M’a conduit vers le bien qui manquait à mon cœur
’’.

Jean-Paul Gouttefangeas

Crédit photo Jean-Luc Gironde, cathédrale Sagrada Familia à Barcelone.