Il arrive à Thiers (et ailleurs) !

Tout avait l’air de bien se passer, plus vraiment de grand froid, des bourgeons apparaissaient sur certains arbustes, des fruitiers étaient déjà couverts de fleurs et surtout les aubépines paraient le bord des routes, sans parler des primevères et des jonquilles et autres narcisses inondant les prairies dans une symphonie de jaunes accentuée encore par les forsythias des jardins. Et puis catastrophe en ces premiers jours de mars, deux gelées nocturnes, un manteau blanc de neige, le rêve du printemps si précoce s’est effondré. Adieu fruits trop hâtifs. Un tout petit point noir sur les fleurs en a sonné le deuil, il n’en fallait pas plus pour nous rappeler que la nature est souveraine et que nos désirs ne se traduisent pas toujours par des aboutissements espérés !

Bien sûr le printemps officiel n’est pas encore arrivé, pour cela il nous faudra attendre la date officielle du 20 mars. À ce propos, on s’était habitué à le voir débarquer ce jour-là, puisque ça dure depuis 2008 mais c’est la dernière fois, à partir de l’année prochaine il reviendra à la date à laquelle nous aimons le voir revenir, c’est-à-dire le 21 mars. De fait, sa naissance se situe toujours entre les 19 et 21 mars de chaque année. Peut-être vous aura-t-il échappé que la dernière fois que le printemps a commencé un 19 mars c’était en 1796 ! Allez, ne soyez pas ‘’chagrin’’ vous reverrez la même chose en 2044. Vous me raconterez, parce que moi (en principe) je ne serai plus là !

Sans entrer dans les détails et pour faire vite, ces yoyos de date sont dûs aux équinoxes, vous savez quand le soleil (deux jours de l’année) est parfaitement aligné avec l’équateur et que le jour se partage parfaitement entre le temps du jour et celui de la nuit. Ainsi, les jours rallongent depuis le 22 décembre de l’année dernière et cette progression se terminera le 20 juin.

Il n’empêche que ce ‘’primum tempus’’ (le début) est toujours attendu avec une certaine impatience, il faut dire que c’est un synonyme de jeunesse et qu’il nous réveille tous, y compris la nature dans son ensemble, c’est comme un grand ménage (de printemps) qui se met en place avec son regain d’énergie. Ce que nous voyons autour de nous se transforme et n’est plus pareil. Lentement mais sûrement les arbres se rhabillent, les oiseaux se marient, déjà les mésanges charbonnières visitent des ‘’appartements’’, les hérissons se réveillent sous les pommiers et les cerisiers en fleurs, les étourneaux se montrent et les hirondelles arriveront (bientôt), même si elles ne font pas le printemps, elles occupent, timidement encore, l’espace sonore, bientôt ce sera le coucou que nous entendrons et selon le dicton : ‘’Au dimanche des Rameaux, les vipères sortent des talus’’.

Cette demi-saison entre le froid et le chaud nous fera sortir de la maison pour aller à la rencontre de la senteur des lilas, on sèmera la terre, on taillera les arbres parce que c’est le début de la belle saison, nous mettrons alors l’hiver sous le paillasson parce qu’après lui c’est le printemps !

Autre signe du changement, avez-vous vu l’agitation qui sévit dans les platanes de l’avenue Léo Lagrange et un peu partout dans les grands arbres ? C’est normal, les pies sont en pleine effervescence, ne dit-on, pas ‘’à la St Mathias, la pie choisit sa place’’, car ‘’au Vendredi Saint, la pie pond l’œuf’’ ! Ces ‘’Pica pica’’ (pies) s’y prennent très tôt dans la nouvelle saison car leurs maisons sont d’un gros volume, et bâties très solides (elles y reviennent plusieurs années de suite), de plus chaque couple en bâtit plusieurs prévoyant qu’en cas de malheur (destruction par un prédateur) il pourra changer rapidement de domicile. Toutefois, seul le gros nid en forme de pyramide renversée qui sera choisi sera recouvert d’un toit très fourni de brindilles, l‘entrée se fera latéralement pour plus de sûreté. Bien à l’abri dans une petite coupelle de terre tapissant le fond de l’abri, 5 à 7 œufs y seront déposés et l’incubation durera 22 jours, là, les oisillons resteront au nid autant de temps au moins avant l’envol et l’aventure de la vie de pie. Moralité : ‘’ Quand on voit une pie, tant pis, quand on en voit deux, tant mieux’’ ! Puisque je suis dans les dictons, restons y : ‘’ Au peuplier plus le nid sera haut, plus l’été sera beau’’.

J’arrête avec mes histoires de pies aux ‘’parpelles d’agasse’’ (grands yeux noirs en gallo) sans vous avoir dit auparavant que ces étonnants oiseaux ne connaissent pas le divorce, ils sont fidèles en amour jusqu’à la mort qui survient au bout d’une quinzaine d’années d’existence. Pour autant ils ne jouissent pas d’une très bonne réputation dans les campagnes : omnivores, nécrophages, ils aiment beaucoup les fruits de nos jardins, cerises, fraises, prunes et autres tomates. De plus, ils enlèvent les oisillons dans les nids et, les ayant déchiquetés, en nourrissent leurs propres petits.

Décidément, j’aurai grandement associé le printemps aux oiseaux dans cette chronique, puisque j’y reviens en vous disant que longtemps encore j’espère que nous saurons interpréter les signes que nous donnent les oiseaux (et pas seulement la pie qui jase ou jacasse !) par ces quelques dictons plus ou moins connus :

‘’À l’Annonciation les ‘’arondelles’’ viennent annoncer la belle saison’’.
‘’Quand le merle chante avant la grive, va chercher du bois, il va faire froid’’

Souvenons-nous aussi que, quand on entend la chouette au printemps, elle avertit d’un tardif coup de gel ; elle a froid aux pattes dit-on et elle souffle (ulule) dessus pour les réchauffer.

Néanmoins chers lecteurs, le printemps arrive je vous le souhaite beau et fleuri avec de la chance pourquoi pas, puisque la pie en est, paraît-il, le symbole dans certains pays d’Asie.

Jean-Paul Gouttefangeas

Merci à François-Noël Masson pour la superbe photo qui illustre cette chronique.