Habiter les jours qui viennent
À minuit précis, quelque chose se passe. Pas de bruit spectaculaire, pas de rideau qui tombe, juste un léger déplacement du temps. Comme si le calendrier changeait de trottoir et nous invitait à traverser avec lui.
Les douze mois qui s’annoncent arrivent sans promesse écrite, les poches vides mais les mains ouvertes. Ils ne jurent rien, n’assurent rien. Ils disent seulement : on est là, qu’est-ce qu’on fait ensemble ?
Alors on se surprend à espérer. Pas des miracles, non. Plutôt des matins moins lourds, des soirées qui tiennent chaud, des nouvelles qui font respirer un peu plus large. On imagine des erreurs utiles, des joies simples, des silences qui reposent. On se dit que ce qui fait mal pourrait faire moins mal, ou au moins autrement.
Le changement de date a ce pouvoir étrange : il autorise à déposer ce qui fatigue, à garder ce qui compte, et à réorganiser le reste sans trop se justifier. Comme un bureau qu’on range à la va-vite, mais avec l’intention sincère de travailler mieux demain.
Pour chacun, que les jours à venir penchent du bon côté. Que certaines rencontres tombent juste. Qu’il y ait du courage quand il en faut, et du répit quand c’est possible. Que l’année qui commence se montre plus douce que celle qui s’éloigne, ou, si elle ne peut pas l’être, qu’elle trouve chacun un peu plus solide, plus entouré, plus vivant.
Minuit est passé depuis longtemps maintenant. Le bruit est retombé, les verres sont vides, la nuit s’étire. Le temps, lui, avance sans se retourner. Et nous avançons avec lui, chargés de nos fragilités, de nos élans, de nos promesses muettes.
Que les jours à venir laissent parfois la place à l’émerveillement. Qu’ils offrent des éclaircies imprévues, des secondes suspendues, des raisons de lever les yeux. Et si tout n’est pas simple, que le chemin le soit un peu plus. Il n’est pas nécessaire qu’il soit parfait : qu’il soit habitable suffira.